La thèse propose une analyse du Minos, court dialogue du Corpus Platonicum considéré comme apocryphe à partir du XIXème siècle. Ce dialogue pose la question de la définition de la loi et fait l’éloge de la figure de Minos en tant que roi et législateur. En le resituant dans son contexte historique au-delà de toute question d’authenticité, l’étude se propose de restituer au dialogue son organicité et son unité, qui lui sont niées par les études qui considèrent le dialogue comme le sous-produit d’un imitateur. L’étude se compose de trois noyaux. D’abord, une étude sémantique de l’argumentation, fondée sur des jeux étymologisants entre nomos, nomizein, dianemein, nemein, nomeus, permet à la fois de retracer l’unité et la subtilité de l’argumentation du dialogue et d’entamer une réflexion sur l’étymologie comme méthode argumentative utilisée par Platon et attestée dans d’autres dialogues apocryphes. Ensuite, une étude des trois définitions de la loi présentes dans le dialogue mène à une discussion sur les ressemblances et les différences entre le Minos et les grands dialogues politiques du corpus, République, Politique et Lois. Enfin, l’étude de l’éloge du roi Minos permet de voir les éléments communs au Minos et aux Lettres et de situer le dialogue dans un contexte précis : au IVème siècle, lorsque surgit un nouvel intérêt pour les figures monarchiques, et en particulier dans le contexte de l’Académie ancienne. L’éloge qui fait de la figure de Minos (perçu comme un tyran dans la société athénienne) un roi-législateur fondateur des meilleures lois grecques apparaît comme un manifeste de l’entreprise des réformes des tyrannies commencée par Platon et continuée par les Académiciens après sa mort. Les trois analyses aboutissent toutes à la même conclusion : le Minos peut être considéré comme l’une des premières exégèses des dialogues politiques de Platon dans le cadre de l’Académie. Cette exégèse présuppose une « lecture » de la lettre figée des dialogues authentiques et en reprend les concepts, les images et les méthodes dans une forme qui en est déjà une fixation et une schématisation, dans un contexte politique sensible au renouveau de la figure royale. Enfin, la ressemblance entre le Minos et nombre de fragments attribués à Archytas permet de considérer le Minos comme un hypo-texte fondamental dans la formation des écrits politiques pseudo-pythagoriciens.

Le Minos dans le Corpus Platonicum / Scrofani, Francesca. - (2017), pp. 1-331.

Le Minos dans le Corpus Platonicum

Scrofani, Francesca
2017-01-01

Abstract

La thèse propose une analyse du Minos, court dialogue du Corpus Platonicum considéré comme apocryphe à partir du XIXème siècle. Ce dialogue pose la question de la définition de la loi et fait l’éloge de la figure de Minos en tant que roi et législateur. En le resituant dans son contexte historique au-delà de toute question d’authenticité, l’étude se propose de restituer au dialogue son organicité et son unité, qui lui sont niées par les études qui considèrent le dialogue comme le sous-produit d’un imitateur. L’étude se compose de trois noyaux. D’abord, une étude sémantique de l’argumentation, fondée sur des jeux étymologisants entre nomos, nomizein, dianemein, nemein, nomeus, permet à la fois de retracer l’unité et la subtilité de l’argumentation du dialogue et d’entamer une réflexion sur l’étymologie comme méthode argumentative utilisée par Platon et attestée dans d’autres dialogues apocryphes. Ensuite, une étude des trois définitions de la loi présentes dans le dialogue mène à une discussion sur les ressemblances et les différences entre le Minos et les grands dialogues politiques du corpus, République, Politique et Lois. Enfin, l’étude de l’éloge du roi Minos permet de voir les éléments communs au Minos et aux Lettres et de situer le dialogue dans un contexte précis : au IVème siècle, lorsque surgit un nouvel intérêt pour les figures monarchiques, et en particulier dans le contexte de l’Académie ancienne. L’éloge qui fait de la figure de Minos (perçu comme un tyran dans la société athénienne) un roi-législateur fondateur des meilleures lois grecques apparaît comme un manifeste de l’entreprise des réformes des tyrannies commencée par Platon et continuée par les Académiciens après sa mort. Les trois analyses aboutissent toutes à la même conclusion : le Minos peut être considéré comme l’une des premières exégèses des dialogues politiques de Platon dans le cadre de l’Académie. Cette exégèse présuppose une « lecture » de la lettre figée des dialogues authentiques et en reprend les concepts, les images et les méthodes dans une forme qui en est déjà une fixation et une schématisation, dans un contexte politique sensible au renouveau de la figure royale. Enfin, la ressemblance entre le Minos et nombre de fragments attribués à Archytas permet de considérer le Minos comme un hypo-texte fondamental dans la formation des écrits politiques pseudo-pythagoriciens.
2017
XXVIII
2017-2018
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